“C’est votre jeune épouse ?
Quel cou ravissant !”

— comte Orlok

Friedrich Wilhelm Murnau

Réalisateur

Né Friedrich Wilhelm Plumpe le 28 décembre 1889 à Bielefeld (Allemagne), dans une famille de la moyenne bourgeoisie, Murnau est l’un des maîtres incontestés de l’expressionnisme allemand. Dans un premier temps, il abandonne des études de philologie et d’histoire de l’art, pour se consacrer dès 1911 au théâtre en tant qu’acteur (sous le nom d’Helmuth, puis de Wilhelm Murnau), puis aussi la mise en scène avec Max Reinhardt. À cet époque, il avait pour compagnons des noms tels que Conrad Veidt, Ernst Lubitsch, Alexander Granach (futur Knock), Ernst Hoffmann, etc. Il est intéressant de noter que Henrik Galeen, futur scénariste de “Nosferatu”, fut assistant de Max Reinhardt, de même que Max Schreck, futur comte Orlok, fit partie de la troupe, à son époque, et Greta Schroëder aussi travailla avec lui.

Pendant la Première Guerre Mondiale, Friedrich Wilhelm est mobilisé dans l’aviation allemande, période durant laquelle il survit à huit crashs ! Cela lui causera une maladie de reins, dont il continuera à souffrir par la suite. Il est ensuite fait prisonnier en Suisse, en décembre 1917.

De retour en Allemagne en 1919, et prenant le pseudonyme de Murnau (du nom d’une commune de Haute-Bavière, Murnau am Staffelsee), il réalise ses premiers films, dont la plupart sont perdus ou dont seuls des fragments ont été retrouvés.

Lorsqu’il s’attaque à l’adaptation du roman “Dracula” de Bram Stoker, sous le nom “Nosferatu, Une Symphonie de l’Horreur” (“Nosferatu, eine Symphonie des Grauens” en version originale, parfois appelé “Nosferatu, Le Vampire” en français), il a déjà à son actif neuf films, dont “Le Crime du docteur Warren” (“Der Januskopf”), film librement inspiré de “Docteur Jekyll et Mr. Hyde”

Après “Nosferatu”, il tourne “Le Dernier Homme” (“Der Letzte Mann”) en 1924, puis “Faust, Une Légende Allemande” (“Faust, eine deutsche Volkssage”) en 1926. Invité par la Fox, il émigre aux États-Unis en 1926, où il réalise “L’Aurore” (“Sunrise”) l’année suivante à Hollywood, film couronné par trois Oscars lors de la toute première cérémonie des Academy Awards : meilleure valeur artistique (la seule fois où ce prix fut décerné), meilleure actrice (Janet Gaynor, qui remporte l’Oscar pour trois films à la fois) et meilleure photographie (dûe à Charles Rosher et Karl Struss). Ce film est d’ailleurs considéré par beaucoup comme le chef-d’œuvre de Murnau, et comme l’un des films les plus marquants de l’histoire du cinéma. Il faut reconnaître que Murnau parvient à transcender un scénario insipide au départ, et le hisse, par son art de la mise en scène et du cadrage, au rang de monument cinématographique.

Il réalise encore “Les Quatre Diables” (“Four Devils”, perdu) et “L’Intruse” (“City Girl”), film auquel les studios de cinéma ajoutent des séquences parlantes. Désavouant cette version sonore qui n’est pas la sienne, Murnau quitte alors la Fox pour voyager dans le Pacifique Sud, où il tourne “Tabou” (“Tabu”), dont des scènes furent censurées aux États-Unis. À quelques jours de la sortie du film, à l’âge de quarante-deux ans, Murnau décède dans un accident de voiture en Californie. C’était le 11 mars 1931. La légende voudrait qu’un chaman aurait maudit Murnau pour tous les sacrilèges commis par son équipe lors du tournage, notamment la violation d’un site sacré…

Souvent fantastique, très poétique, le cinéma de Murnau surprend encore aujourd’hui par ses audaces et son inventivité : mouvements de caméra, panoramiques et travellings, accélérés, surimpressions, négatif, décors naturels, les effets spéciaux surprenants de “L’Aurore”, et toujours parfaitement au service de l’histoire qu’il raconte. Sa science du septième art le place ainsi, d’abord parmi les plus grands du cinéma allemand de l’époque, à l’égal d’un Fritz Lang, mais aussi par la suite, dans toute l’Histoire du cinéma. Il influencera d’ailleurs de nombreux cinéastes, tels qu’Alfred Hitchcock, qu’il avait fortement impressionné. John Ford, Charlie Chaplin et beaucoup d’autres ont reconnu le génie de Murnau.

  • Bibliographie : “F.W. Murnau”, de Lotte H. Eisner

Friedrich Wilhelm Murnau, réalisateur de “Nosferatu, Une Symphonie de l'Horreur” (portrait par Hans Natge)
Friedrich Wilhelm Murnau sur un plateau de cinéma au cours d'un tournage